Descripteurs généraux
Mots-clés formels
Mots-clés iconographie
Titre:
Autoportrait au compas
Auteur:
Louis Rivier
Date de création:
1935
Description iconographique:

Dans cet autoportrait de la maturité, Rivier regarde le spectateur, la tête et le buste tournés légèrement de trois-quarts. Il est assis sur une chaise. Son bras gauche est plié et posé sur le dossier, le coude sortant du cadre. La main est suspendue, les doigts se replient, formant un poing, sauf l’index qui pointe vers la feuille. Ce geste rappelle celui de l’admonitor, personnage qui, dans une peinture classique depuis la Renaissance, oriente l’attention du spectateur en lui indiquant ce qu’il doit regarder. Louis Rivier devient admoniteur en guidant l’œil du spectateur vers la feuille, objet-emblème de l’acte artistique. A l’annulaire gauche, il porte son alliance, bien visible. Le bras droit est, quant à lui, plié et la main posée sur une table tient, avec le pouce et l’index, un compas qui effleure la feuille blanche. Louis Rivier se représente sûr de lui : son sourcil gauche est soulevé dans une expression à la fois attentive et scrutatrice. Ses lèvres esquissent un léger sourire.

Dans cet autoportrait, Rivier est âgé de 50 ans. Ses cheveux sont gris et bien coiffés sur le côté. Le peintre prête une attention particulière à l’incarnat : la peau des mains et du visage est traitée avec minutie. On voit parfaitement les rides du front, la lumière et l’ombre frappant les différentes zones de l’oreille gauche, un léger pointillisme gris marquant le rasage de la barbe, les plis au niveau du nez et de la bouche, le rose vif rougissant sa joue gauche, les veines bleutées et les jointures rose foncé de la main gauche. Cet autoportrait produit un effet photographique. Le réalisme se traduit aussi dans le rendu des habits. Louis Rivier porte une ample chemise blanche et un gilet rouge tricoté. Les plis de la chemise, rendus par un jeu d’ombres et de lumière, procurent une sensation tactile. Le bouton de manchette devient un détail remarquable.

L’arrière-plan est constitué d’un paysage de collines vert clair et indigo, peint selon les principes de la perspective aérienne, c’est-à-dire en dégradé (sfumato). Le ciel est traversé par d’amples touches bleues et blanches, poudrées. Le moment de la journée est vraisemblablement celui du lever du soleil. La lumière générale est douce éclairant en particulier la partie gauche du visage et du corps. Le peintre, dans l’âge mûr, semble refonder, de manière symbolique, son pacte avec l’acte artistique.

Dans cet autoportrait, Rivier se représente dans son identité de peintre, au travail, assis à une table, avec une chemise rappelant les blouses des artistes et tenant dans la main un compas, emblème d’une peinture qui s’appuie sur des bases techniques et plus particulièrement géométriques. Dans cette œuvre, Rivier souligne donc sa position de peintre « classique » attaché à une certaine conception de la peinture : un art exigeant un savoir et une maîtrise technique au service d’un but supérieur. L’expression assurée qu’il assume ici signifierait que ce savoir et cette maîtrise sont pleinement acquis et durables. Cet autoportrait se révèle comme une mise en scène : le peintre a choisi un attribut (le compas), il adopte une posture et pose à la manière d’un grand maître.