Jeune femme à la prairie (Julie)
Droits:
Réservés
Crédits:
Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne
Commentaires:

Numéro d’inventaire : 991

Type d'œuvre:
peinture
Auteur:
Louis Rivier
Transcription de signature:
LOUIS RIVIER
Emplacement: —
Remarques sur la signature:

La signature est accompagnée de la date de création : 1917.

Description iconographique:

Ce tableau est un portrait de Julie Rivier (1891-1984), épouse du peintre. Julie et Louis se sont mariés en 1911 ; la jeune femme est ici âgée de 26 ans.

Julie est debout et se tient derrière un muret donnant sur une prairie verdoyante. Buste et visage sont de trois-quarts, orientés vers la gauche. Julie est représentée jusqu’aux hanches. Elle regarde devant elle et ses lèvres esquissent un léger sourire. Elle a l’air calme et sereine. Sa main gauche se pose sur le muret dont on ne voit qu’une fine bande occupant le bord inférieur du tableau. L’annulaire gauche est orné d’une bague surmontée de trois perles, bijou que l’on trouve aussi dans le dessin Julie (1912) dans le Portrait de jeune femme (Julie) de 1913 et dans le Portrait de Julie Rivier (au manteau de fourrure) de 1943. Cependant, dans ces deux derniers tableaux, Julie porte la bague à l’annulaire droit et l’alliance à celui de gauche. Dans ce portrait-ci, l’alliance est remplacée par la bague. S’agit-il d’un choix ayant une signification symbolique.

Julie se montre en tant que figure atemporelle. D’autres éléments, analysés ci-après, suggèrent cette interprétation. Les doigts de sa main droite jouent avec un sautoir doré qu’elle porte autour du cou. Un deuxième bijou embellit son décolleté. Il s’agit d’un collier avec un médaillon-pendentif de forme ovale serti d’or avec trois pierres précieuses incrustées, véritable emblème de Julie. Selon le récit familial, Julie a reçu ce médaillon de sa mère qui l’avait elle-même reçu de sa mère, Virginia Robert née Imer qui le tenait de sa mère Rose Imer de Gélieu. Il provient du roi de Prusse Frédéric-Guillaume III qui l’avait offert à Salomé de Gélieu, préceptrice de Louise, reine de Prusse, son épouse.

Dans ce portrait, la jeune femme est habillée d’une robe rouge garance ; ses bras sont couverts par un châle clair qu’elle porte sur les épaules. Ses cheveux sont attachés en chignon derrière la nuque ; une pince est accrochée à sa chevelure brune. Ses yeux clairs sont d’une grande douceur ; ses joues sont ravivées par une teinte rose vif.

La silhouette de Julie se démarque d’un paysage de campagne : une prairie vert clair traversée par une rivière sinueuse. Le pré est ponctué d’arbres certains avec des feuillages d’autres sans. Ils encadrent la composition accentuant sa symétrie. La saison devient ici indécise.

Au loin, des reliefs bleutés, peints en perspective aérienne, se chevauchent. Le paysage est surmonté d’un ciel bleu et brumeux. Le moment de la journée est indéfini, mais il pourrait s’agir d’un début de crépuscule.

La composition baigne dans une lumière claire et étale. Les ombres façonnent les plis du châle et modèlent les volumes du visage et des mains.

La figure de Julie occupe une position centrale. Sa tête et son buste dessinent une forme pyramidale d’inspiration raphaélesque. La gamme chromatique est construite à partir de quatre couleurs principales, récurrentes chez Rivier : le rouge, le blanc, le vert et le bleu. Ces quatre couleurs trouvent aussi leur source d’inspiration dans les compositions de Raphaël et, en particulier, dans ses « Vierge à l’enfant ». Plus précisément, ce portrait de Julie fait référence à La Madone à la prairie (1505-1506, Kunsthistorisches Museum, Vienne).

La sinuosité de la rivière, les reliefs bleutés, le ciel brumeux, la perspective aérienne et même la présence des arbres délicats, s’inspirent vraisemblablement des paysages à l’arrière-plan de certaines œuvres célèbres de Léonard de Vinci, on pense notamment à La Joconde et à L’Annonciation (1472, Galerie des Offices), parmi les exemples majeurs.

Louis Rivier porte une attention particulière au rendu de la carnation et au réalisme des traits du visage de son épouse : la transparence de yeux, la consistance soyeuse des cheveux, le contour des lèvres.

La référence à la grande peinture permet à Louis Rivier de célébrer la figure de Julie, de lui conférer un air atemporel. Sa douceur, son calme intérieur et sa sérénité en font presque une icône sacrée. Une icône toutefois animée par le style réaliste adopté par le peintre et par le détail de la main posée sur le muret, qui semble pouvoir sortir du cadre grâce à un effet de trompe l’œil. Ce tableau de Louis Rivier est une interprétation affectueuse et en même temps noble de son épouse.

Type de composition:
portrait
Dimensions (en cm)
Hauteur:
73 cm
Largeur:
60 cm
Profondeur: —
Dimensions montage (en cm)
Hauteur:
90 cm
Largeur:
75 cm
Profondeur: —
État de l'œuvre:

Bon état.

Inscription(s) notable(s): —
Technique:
tempera
Support de l'œuvre:
carton
Commentaires techniques:

Louis Rivier adopte la détrempe dès 1906 jusqu’à la fin des années 1930. La détrempe est une technique traditionnelle de la Renaissance italienne (tempera all’uovo). « La tempera à l’œuf italienne était l’héritière directe de la tradition byzantine […]. Le nombre de tableaux peints à tempera est considérable […]. Elle est pourtant tombée en désuétude au cours des XVIe - XVIIe siècles. ». (François Perego. 2005. Dictionnaire des matériaux du peintre, Paris : Ed. Belin, p. 706).

La recette de Rivier, mise au point par Théophile Robert, comporte du jaune d’œuf, de la résine d’Avar ou copal, de l’huile de noix pure, du vinaigre blanc et de l’eau. (Dario Gamboni, Louis Rivier (1885-1963) et la peinture religieuse en Suisse Romande, p. 97).

Au cours de sa carrière, Louis Rivier rencontre plusieurs difficultés quant à l’emploi de la détrempe. Ces obstacles l’amènent à abandonner momentanément cette technique au profit de l’huile. Mais, « […] après quelques années de tentatives obstinées, il finit par maîtriser la détrempe à tel point qu’il put l’utiliser pour ses paysages aussi bien que pour ses portraits, et pour d’autres compositions. » (Francesco Sapori, Louis Rivier, p. 38)

En 1938-39, Rivier invente, à partir de dessins aux crayons de couleurs, le « procédé spécial », technique qu’il emploiera pour presque toutes ses œuvres même en grand format et réalisées pour des décorations murales. Une exception notoire est la décoration de l’Église orthodoxe grecque de Lausanne qui a été réalisée entièrement à la détrempe, et cela sur une durée de plus de 15 années, jusqu’en 1940.

Lieux de création:
Jouxtens-Mézery
Lieu de conservation:
Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne
Provenance:
Acquisition en 1929
Date de création:
1917
Commentaires sur le lieu et la datation:

En 1917, Louis Rivier devient membre de la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses (SPSAS). Il participe à l’Exposition de la section vaudoise de la SPSAS dans le bâtiment Arlaud à Lausanne et, à Zurich, du 15 mai au 31 juillet à la XIIIe Exposition nationale suisse des Beaux-Arts.

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