Ce dessin à la mine de plomb représente un ange jouant d’un instrument qui ressemble à une mandoline. Le jeune musicien se tient debout et son corps est orienté de face. Le visage est à peine de trois-quarts. Deux grandes ailes pointues descendent le long de son corps. Il est habillé d’une longue tunique à manches courtes caractérisée par de nombreux plis tubulaires. L’ange a les cheveux bouclés, coupés au carré, avec une courte frange. Une fine couronne orne son front. Une auréole entoure sa tête. Ses traits physionomiques sont génériques et stylisés. L’ange est d’une beauté idéalisée. Il a la bouche entrouverte, comme s’il chantait pour accompagner sa musique. Les doigts de sa main gauche pincent les cordes de l’instrument ; l’autre main tient le manche et fait des accords.
Le petit musicien est exécuté d’un trait épais et précis, mais aussi libre et souple comme par exemple les boucles de sa chevelure. Plusieurs lignes superposées définissent sa silhouette, mais aussi le contour de l’auréole et celui du vêtement. On devine la recherche de la forme conduite par la main du dessinateur. Les ombres sont rendues grâce à un filet de hachures fines et répétées qui créent les volumes du visage et façonnent les plis de l’habit. Ce dernier se termine en dégradé : les traits deviennent de plus en plus légers et les pieds de l’ange ne figurent pas dans la composition.
Ce dessin est une étude pour la décoration murale du temple de Mex, où Louis Rivier peint deux longues frises avec des anges choristes et musiciens.
Le thème des anges musiciens, ou des jeunes musiciens, profanes ou sacrés, sera récurrent dans l’œuvre de Rivier. Ce sujet réunit deux grands intérêts du peintre : le monde de l’enfance et celui de la musique. Par ce biais, Louis Rivier rend hommage à l’harmonie divine, harmonie que les mélodies jouées par ces jeunes gens, candides et célestes, célèbrent.
Bon état. Feuille jaunie.
Ce dessin a été réalisé entre 1908 et 1909. A cette époque, Louis Rivier étudie à l’École de médecine de Lausanne durant 6 mois, suivant les cours d’anatomie du professeur Auguste Roux et de dissection.
Alors qu’il travaillait aux panneaux décoratifs de la salle à manger du château de Pradegg à Sierre, Louis Rivier, reçut une proposition qui l’intéressa. Deux architectes, Fernand Grenier (1879-1970) et Alfred de Goumoens (1878 – 1970) procédaient à des restaurations et des transformations du temple de Mex. Richard Heyd explique: «Ils avaient persuadé les autorités du petit village de Mex, près de Lausanne, de faire peindre une fresque dans l’ogive d’une fenêtre murée de leur église. Cette proposition comblait un vœu que Rivier avait formé depuis longtemps, mais qui, dans l’état d’esprit qui régnait alors, paraissait voué à l’échec : le froid protestantisme n’était-il pas farouchement opposé à toute peinture dans ses églises ? Fort de l’expérience de Sierre, Rivier n’hésitera pas à exécuter sa décoration sur place.[…] il procédera en improvisant : aucun carton en grandeur, aucun avant-projet, seuls quelques vagues croquis lui indiquant si la composition s’équilibre. Puis une ébauche rapide sera faite au pinceau à même le mur et les figures, vêtues de pied en cap sortiront de la palette. »(Richard HEYD. 1943. Rivier, Neuchâtel et Paris : Editions Delachaux et Niestlé. p. 35). Rivier exécuta d’abord une Crucifixion, détruite en 1978 et ensuite les deux cortèges d’anges musiciens de L’Alléluia de l’Apocalypse dans le registre supérieur des murs nord, est et sud.
Le temple rénové est inauguré en septembre 1909.
- Isabelle ROLAND. 2016. Mex au fil du temps, Commune de Mex, p.73-79
- Richard HEYD. 1943. Rivier, Neuchâtel et Paris : Editions Delachaux et Niestlé