Louis Rivier peint le portrait à mi-corps de deux enfants : Gianfranco et Diana de Rham. Le frère et la sœur se tiennent debout derrière un support marron et rond qui pourrait être un pouf ou un coussin en velours. Les mains des enfants s’enfoncent et jouent avec la matière textile. Le visage de Gianfranco est de face, son buste légèrement de trois-quarts. La main droite repose sur la hanche en un geste d’affirmation. Il sourit au spectateur et sa pose mime celle d’un adulte. Il a les yeux bruns en amande et les cheveux blonds et raides bien coiffés sur le côté. Seule une petite mèche lui tombe sur le front. Il porte un pull rouge. A ses côtés, Diana a le buste penché en avant, elle pose ses avant-bras sur le coussin et enfonce son index dans la texture moelleuse. L’autre main repose sur l’avant-bras opposé. Elle est visiblement plus grande que Gianfranco. Elle regarde sur sa gauche, à l’extérieur du tableau, et sourit. Elle a les yeux bruns et les cheveux marron bouclés. Elle porte une robe à manches courtes.

Louis Rivier prête une attention particulière aux détails des visages et des mains. On arrive à distinguer parfaitement chaque cheveu de la chevelure de la petite fille, ses sourcils ainsi que ses cils, les jointures légèrement foncées des doigts des deux enfants, leurs ongles, les plis qui se forment entre le nez et la bouche et même les incisives de Diana car son sourire laisse un petit espace entre ses lèvres. Ce double portrait relève d'un réalisme photographique.

Les deux enfants se tiennent devant un paysage lacustre. En arrière-plan, une chaîne de montagnes s’étend jusqu’à l’horizon. Le ciel est bleu gris, très clair, traversé par une sorte vapeur rosée. La lumière est tamisée et les couleurs sont estompées, comme absorbées par cette brume diffuse.

La composition est symétrique, comme si deux portraits étaient juxtaposés. Le paysage s’offre à la vue, de part et d’autre des enfants, comme si on avait levé un rideau. Ce jeu géométrique rigoureux et statique est contrebalancé par les gestes des bras des enfants qui animent ainsi la partie inférieure de la composition.

Le format du tableau, en lunette, accentue le caractère familial, privé et domestique de cette peinture.

Gianfranco de Rham était propriétaire du manège de la Gambade à Laconnex (Genève), centre équestre construit en 1963.

Diana de Rham était journaliste et traductrice, active dans le monde artistique romand notamment autour du Musée des arts décoratifs de Lausanne. Elle a épousé Frank Jotterand et est décédée en 2000.

Le « procédé spécial » est une technique personnelle élaborée par Louis Rivier. Le peintre se sert principalement de crayons de couleur, craies, diluants et gommes. Richard Heyd, biographe officiel de Louis Rivier, décrit ainsi sa méthode : « [Il] enroule autour de son doigt un chiffon au moyen duquel il fait disparaitre entièrement les traits de crayons ; la matière gagnera ainsi en homogénéité et son éclat deviendra comparable à celui de la peinture sur émail » (Richard Heyd, Rivier, p. 156). Dès 1938, Louis Rivier en fera sa technique privilégiée.

En 1939, à son retour de Rome, Louis Rivier s’installe avec sa famille dans le château de Mathod, près d’Yverdon-les-Bains, propriété de la famille de Julie. En 1940, il achève la décoration de l’église orthodoxe grecque de Lausanne. Il fait la connaissance de l’industriel et collectionneur Arthur Stoll qui lui achète l’année suivante la grande Descente de Croix exécutée au procédé spécial. Stoll lui achètera encore huit autres œuvres.

Du 17 mars au 3 avril a lieu à Lausanne son exposition Louis Rivier. Portraits-Paysages-Croquis. Une soixantaine de planches illustrant les Evangiles.