Ce tableau est un portrait en buste d’Arthur Stoll, chimiste, industriel et collectionneur d’art vivant principalement à Bâle qui, dès 1940, achète à Louis Rivier plusieurs tableaux.

Le regard et le haut du corps sont orientés de face tandis que le visage est tourné légèrement de trois-quarts. Le bras gauche est plié et le coude, vraisemblablement posé sur un support, sort en partie du cadre conférant au portrait une pose photographique. La moitié de son bras droit est aussi hors champ. Arthur Stoll est habillé d’un manteau marron foncé dont l’ample col de fourrure s’entrouvre pour laisser apparaître un gilet clair, une chemise blanche et une cravate rouge ornée d’une perle blanche. Sa main gauche, gantée, tient le gant de la main droite. Les coutures de cet accessoire accentuent la richesse de la bienfacture. Le cuir couleur ocre, avec sa consistance fine, recouvre les doigts comme une seconde peau. Louis Rivier peint avec maestria la diversité des matières : l’épaisseur rigide du tissu du manteau, la souplesse de l’étoffe de la chemise et la douceur du cuir des gants.

Arthur Stoll porte une sorte de béret noir, qui laisse dépasser des cheveux foncés. Ses sourcils noirs dessinent un accent circonflexe. Sa moustache semble un peu décalée par rapport à la position des lèvres. Cela confère une expression particulière à son visage, comme une sorte de sourire malicieux. Ses yeux, légèrement plissés, accentuent cette impression.

Le fond bleu nuit est neutre. Les ombres, presque absentes, soulignent délicatement les plis du manteau et modèlent les traits du visage.

Ce portrait, caractérisé par trois couleurs principales - le noir, le blanc et le rouge - est sobre : minimaliste avec la figure occupant une position centrale et frontale. Toute l’attention se focalise sur la présence d’Arthur Stoll dont le regard perçant incite le spectateur à imaginer sa personnalité.

Ce portrait, dans la posture de la figure et dans l’accessoire du gant rappelle le célèbre Homme au gant (1520-1523, Le Louvre) de Titien. On sait que Louis Rivier, à l’époque de sa formation à Paris allait au Louvre copier les tableaux de maîtres.

Toutefois, l’existence de photographies présidant au portrait semble attestée d’après ces lignes adressées à Louis Rivier par Arthur Stoll de Bâle, le 6 septembre 1943 : «J’ai naturellement appris avec beaucoup d’intérêt que vous êtes en train de recommencer mon portrait de mémoire. Malheureusement la photographie avec le manteau à col de fourrure que ma femme vous avait montrée se trouve à Corseaux. Je n’ai pu trouver que la photo ci-jointe qui vous montre la fourrure, tandis que mon visage montre bien les traces des douleurs d’une sciatique qui m’empêchait presque de marcher à ce moment-là. La petite photo que j’ajoute en même temps et qui fut prise il y a quelques années pour le passeport aidera peut-être un peu votre mémoire, car la pose est semblable à celle de votre portrait.» Fonds Louis Rivier-SIK-ISEA, Lausanne.