Descripteurs généraux
Mots-clés formels
Mots-clés iconographie
Titre:
L'Eveil à la poésie
Auteur:
Louis Rivier
Date de création:
1912
Description iconographique:

Cette composition allégorique représente une figure masculine nue, en position semi-allongée sur un tissu orange posé sur un pré vert, et occupant la quasi-totalité de l’espace. Le jeune homme repose sur le flanc, la jambe gauche légèrement surélevée. Il porte la main gauche à côté de sa joue et de son oreille, comme s’il s’apprêtait à écouter. Il a les cheveux foncés, affiche un délicat profil caractérisé par un nez droit; ses lèvres sont roses et charnues. Il a l’air apaisé et serein. Son regard s’adresse à une jeune fille qui, allongée derrière lui, lui touche la nuque et lui indique quelque chose au loin avec le bras droit, tendu vers l’avant. Son geste est gracieux. Sa tête penche légèrement contre son épaule. Elle est habillée d’une longue robe rouge parsemée de petites fleurs et d’un corsage blanc et bleu qui laisse sa poitrine découverte. Un voile transparent voltige autour de ses bras et couvre sa nuque. Elle a les cheveux châtains, coiffés avec des tresses formant des macarons. Elégante, très féminine, elle transmet une force presque surhumaine. Comme s’il s’agissait d’une déesse, son corps a une beauté abstraite ; elle rappelle certaines figures de Michel-Ange : par exemple les Sybilles de la voûte de la Chapelle Sixtine ou la Vierge de La Sainte Famille à la tribune (Galerie des Offices, 1506-1507). Le corps du jeune homme est lui aussi idéalisé et a une apparence sculpturale.

Les traits des deux visages sont stylisés et n’ont aucune intention réaliste. Le pré, quant à lui, est peint par petites touches vertes, jaunes et ocre reproduisant le mouvement des brins d’herbe. Quelques petites fleurs bleues et rose apparaissent parmi la verdure. D’une manière presque postimpressionniste, Louis Rivier peint le paysage champêtre et les deux grosses pierres aux angles inférieurs de la composition qui la bordent de manière symétrique. Sur la droite, un rouge-gorge perché sur les branches fines et tortueuses d’un arbuste semble observer le couple. La richesse chromatique du pré, ainsi que les sensations tactiles dégagées par sa texture, contrastent avec l’aplat uniforme du ciel et du lac. A l’arrière-plan se dressent quelques reliefs enneigés.

Des aplats lisses façonnent les corps et les habits des personnages. Les rares ombres soulignent d’une manière presque imperceptible les creux des épaules et des aisselles, les volumes des genoux et le dessous du cou. La composition, dans son ensemble, baigne dans une lumière claire, vive et étale.

Louis Rivier focalise son attention sur la représentation allégorique de la scène: la rencontre, mythique, entre un jeune homme et la Poésie, personnifiée par la jeune fille aux traits de déesse ou de muse inspiratrice. Les grandes dimensions de la toile et la technique de la détrempe à l’œuf justifient aussi l’utilisation des couleurs, des teintes vives appliquées en aplats, dont le rendu pourrait rappeler celui des décorations murales. On trouve ce même sujet iconographique dans une des scènes peintes de l’Aula du Palais de Rumine, à Lausanne (panneau consacré aux Arts, côté sud). Les différences sont minimes et la structure est, dans son ensemble, identique. On connait aussi une étude préparatoire de L’Eveil à la poésie, représentant seulement la figure masculine nue, datée de 1915.

L’ensemble de la composition relève du Symbolisme, celui de Paul Robert ou de Giovanni Segantini ainsi que de l’Art Nouveau dans l’attention portée à la nature.