Ce tableau de Louis Rivier représente un paysage de montagnes avec un lac. On reconnaît le massif des Mischabels dans la partie gauche avec les deux sommes pointus du Dom et du Täschhorn ainsi que du sommet plus large et aplati de l’Alphubel. La neige a fondu mais les sommets sont encore blancs : on est vraisemblablement à la fin du printemps.

Le paysage s’ouvre comme une scène de théâtre. La disposition des éléments naturels est symétrique, construite par plans successifs et elle se développe dans l’horizontalité. Au premier plan, Louis Rivier peint un amoncellement de rochers suivi d’un petit lac de montagne entouré d’un terrain herbeux et caillouteux. Le plan suivant est occupé par la chaîne de montagnes. La partie supérieure du tableau est, quant à elle, entièrement dévolue au ciel : bleu, traversé par quelques nuages marron-gris striés d’orange.

Toute la moitié inférieure du tableau baigne dans une lumière bleutée comme si la couleur du ciel se reflétait sur le lac et sur les roches.

Le moment de la journée choisi par le peintre est le crépuscule, l’heure bleue, moment fugace de la fin de journée. Ciel et sommets sont voilés de rose et d’orange. Ces mêmes couleurs chaudes sont utilisées pour souligner les volumes, les creux ou les aspérités des rochers. Quelques traces de peinture rose, rappelant des bribes de nuages, traversent le paysage de droite à gauche.

Le lac est peint par petites touches de bleu, de bleu clair et de rose. Cet effet de pointillisme rend la surface mobile et vibrante, comme agitée de courants. Les roches au premier plan sont quant à elles tracées à à l’aide de plages de couleurs plus larges. Les plans herbeux et rocheux situés aux pieds des montagnes naissent du rapprochement de touches juxtaposées de peinture bleue, verte et marron qui confèrent à la surface une sensation onctueuse et molle. Cette partie de paysage échappe au réalisme et affirme des textures quasi abstraites.

Louis Rivier focalise aussi son attention sur le rendu atmosphérique du paysage et sur les effets de la lumière sur toutes les formes : végétation, lac, montagnes et pâturages.

La gamme chromatique est dominée par le bleu, le vert et le marron, rehaussée par des touches de rose, d’orange et de blanc. Les couleurs chaudes dialoguent avec les froides ; parfois elles se fondent les unes avec les autres en créant une atmosphère douce, tempérée par la lumière du coucher du soleil.

La lumière provient de la droite. Louis Rivier porte ici une attention particulière aux ombres. On remarque celles qui obscurcissent les nuages, celles qui définissent les volumes des parois montagneuses, celle qui s’étalent comme des taches de couleur bleu aux pieds des reliefs, et les ombres portées des rochers au premier plan. On remarque également le reflet des nuages sur la surface du lac. Couleurs, ombres et lumières fractionnent la surface peinte et la rendent vibrante.

L’emploi riche et diversifié de la couleur anime la composition. Dans ce paysage, il n’y a aucune trace de présence humaine ; la nature peinte par Rivier dégage une force interne, alimentée par un dynamisme mystérieux qui semble échapper à l’homme.