Descripteurs généraux
Mots-clés formels
Mots-clés iconographie
Titre:
La Maternité Nestlé à la manière de Van Dick
Auteur:
Louis Rivier
Date de création:
1934
Description iconographique:

Il s’agit d’une allégorie profane sur le sujet de la maternité promouvant le lait en poudre Nestlé. Louis Rivier s’inspire du style du peintre flamand Anton Van Dick. Plus précisément, ses sources figuratives directes sont les portraits des enfants du roi Charles, comme Les cinq enfants de Charles 1er (1637) et Portrait des trois fils aînés du roi d’Angleterre Charles Ier (1635).

Sur une chaise recouverte d’un drap violet, un enfant se tenant à peine assis est nourri au biberon par une fillette à l’air adulte. Le petit regarde en direction de celle-ci et s’accroche avec sa main gauche à son bras. L’autre main effleure le museau d’un chien qui, curieux, scrute le duo. Le bébé, au corps dodu, est habillé d’un simple tissu blanc noué autour des hanches et lui couvrant l’épaule et le bras droits. Il porte un bonnet, blanc aussi. Il a l’air content et satisfait. La fillette est habillée d’une robe blanche élégante, aux manches bouffantes et au drapé volumineux. Elle porte un collier de perles autour du cou. Ses cheveux sont attachés derrière la nuque avec un ruban rouge. Des boucles cachent ses oreilles ; quelques-unes tombent sur son ample front en dessinant des spirales. Son visage est maquillé : une poudre rose vif avive ses joues et un rouge à lèvres illumine son sourire. Ses mains potelées typiquement enfantines, ainsi que ses joues pleines, révèlent son âge (une dizaine d’années environ). La fillette se consacre avec tendresse et amour à sa tâche : elle porte le biberon rempli de lait à la bouche de son petit frère en lui posant délicatement une main derrière l’épaule pour le soutenir.

Sur la droite, un autre enfant, lui aussi âgé d’une dizaine d’années, est assis sur un tapis tissé de motifs à losanges. Ses jambes sont allongées sur le côté, sa main gauche est posée au sol, tandis que l’autre touche le couvercle d’une boîte de lait en poudre Nestlé. La marque est bien visible et fait face au spectateur. Une deuxième boîte se trouve près de celle-ci, dont on ne voit pas l’étiquette, mais dont on imagine le contenu. Le regard du garçon est de face ; il sourit malicieusement. Ses joues potelées sont aussi maquillées. Il porte des cheveux longs, tombant sur ses épaules et une frange sur le front. Il est habillé d’une combinaison (pantalons et chemise à manches longues) en soie rouge. L’ourlet des manches et celui du col sont enrichis d’une dentelle blanche.

Sur la gauche, un grand chien au pelage marron clair, court et lisse est paisiblement assis. Il est représenté de profil, son nez pointe en direction du biberon. Les personnages se disposent en pyramide et le bras de la petite fille tenant le biberon, se trouve au centre de la composition. Exactement comme dans les portraits mentionnés de Van Dick, les trois frères (ainsi que le chien) se trouvent dans un espace incluant des éléments typiques d’un intérieur, mais donnant sur l’extérieur. Il s’agit vraisemblablement d’une loggia. Sur la gauche on voit une table haute, nappée d’une étoffe rouge, au-dessus de laquelle le peintre représente une nature morte : une corbeille à fruits contenant des pêches ainsi que des fleurs couleur fuchsia. Ce rose, très vif, résonne avec le rouge de la nappe, la teinte du tissu de la chaise et le bordeaux du tapis oriental. Juste derrière la table, un rideau foncé, au drapé ample, s’ouvre sur un paysage verdoyant interrompu par la présence d’une colonne grise. Celle-ci repose sur un parallélépipède de pierre. Il y a dans ce détail une touche théâtrale, comme si la scène s’ouvrait, mais du côté du paysage, c’est-à-dire juste derrière les personnages.

Bien que l’arrière-plan soit plutôt sombre, le paysage est illuminé par un ciel bleu clair aux nuages roses. C’est le moment du coucher du soleil. Au loin, on aperçoit un relief bleuté et de la végétation. La cime d’un grand arbre, plus proche, côtoie la base de la colonne. Les ombres façonnent les plis des habits et projettent les silhouettes du chien et du garçon respectivement sur la nappe et sur la colonne.

Les teintes embrasées dominant le décor contrastent avec la candeur des habits du couple central, formé par le bébé et par sa sœur. Le cœur de la composition est avivé par le blanc : couleur du lait. Le peintre utilise donc cette couleur d’une manière conceptuelle en créant une association d’idées entre la pureté, la délicatesse, l’innocence des enfants et le lait contenu dans le biberon. A leurs pieds, la boîte blanche « Nestlé » fournit un indice supplémentaire pour l’interprétation de cette œuvre qui trouve son explication définitive dans la légende située sur le bord inférieur : LA MATERNITE NESTLE A LA MANIÈRE DE VAN DICK. Le nom du célèbre peintre se trouve exactement sous le mot Nestlé. La marque est célébrée par la référence à Van Dick et à sa peinture inspirant élégance, noblesse et valeurs familiales.

Louis Rivier est engagé en 1934 par le groupe Nestlé & Anglo-Swiss Condensed Milk Co. pour concevoir des publicités pour le lait en poudre. Le peintre s’inspire de tableaux de maîtres (Vélasquez, Vermeer, Van Dick, Van Eyck, Raphael, David) pour réaliser les six planches «à la manière de». Dans l’esprit de Louis Rivier, la référence aux grands maîtres a pour but de faire connaître à un large public des œuvres prestigieuses. Il entreprend en quelque sorte une démarche de vulgarisation. Mais on peut aussi y voir un léger jeu de la part du peintre. Rivier s’amuse aussi du détournement d’œuvres d‘art prestigieuses pour des visées publicitaires. Une première publication dans L’Illustration reçut un accueil défavorable de certains qui critiquèrent cet usage commercial. Louis Rivier démissionna de ses fonctions chez Nestlé.