Descripteurs généraux
Mots-clés formels
Mots-clés iconographie
Titre:
Portrait de Maurice Sandoz
Auteur:
Louis Rivier
Date de création:
1938
Description iconographique:

Il s’agit d’un portrait de Maurice Sandoz, chimiste, écrivain, compositeur et collectionneur. Né en 1892, Maurice Sandoz est le cousin de Louis Rivier, il est âgé de 45 ans dans ce tableau. 

L’homme est assis sur un rocher au bord de l’eau. Ses jambes sont repliées ; genou et coude gauches se touchent. Il porte la main gauche au visage, les doigts effleurent la tempe. Cette pose rappelle celle du penseur ou du philosophe maintes fois reprises par les artistes, depuis Dürer jusqu’à Rodin. Maurice Sandoz a un regard absorbé tourné vers le bas, vers un point imprécis et hors champ. Sa main droite repose au sol. Une bague sertie d’une perle est enfilée à son auriculaire. Ses lèvres sont serrées et légèrement étirées, ses cheveux bruns bien coiffés vers l’arrière. Maurice Sandoz est habillé d’un pull rouge garance à col cheminée, d’un pantalon beige. Ses pieds sont nus. On est vraisemblablement au printemps.

La pose est à la fois décontractée et construite. On remarque une certaine raideur au niveau du dos et du bras droit. Cependant, les jambes mi-allongées, les pieds nus, le regard rêveur, le geste des doigts de la main gauche transmettent une sorte de relâchement, une décontraction mesurée.

Louis Rivier porte une attention particulière au rendu de la carnation et au réalisme des détails physionomiques : on pense notamment aux rides se formant au-dessus du sourcil droit, aux ongles, aux plis des mains et du cou. La texture du pull et les cheveux légèrement brillants procurent des sensations tactiles.

A l’arrière-plan, le paysage s’ouvre en perspective sur une étendue d’eau, d’un bleu azur. Il s’agit vraisemblablement de la mer près de Naples ou de Rome, ville où Maurice Sandoz séjournait. L’identification précise du paysage n’est pas très importante dans ce portrait : le calme plat de la surface aquatique, la douceur des bateaux y navigant, la délicatesse des profils montagneux concordent avec l’attitude du protagoniste, capturé lors d’un moment d’introspection.

Par les choix formels, comme le traitement de la couleur, proche du style de Giovanni Segantini, distribuée par touches vibrantes, segmentées et répétées, ou encore par la juxtaposition de fines hachures, Louis Rivier dépeint l’activité intérieure du protagoniste. Il s’agit d’une réflexion intense voilée d’une ombre d’agitation (les lèvres serrées, le regard fixe) plus qu’une rêverie insouciante. Il y a dans ce portrait une ambiance un brin métaphysique, proche de certaines œuvres de Giorgio de Chirico.

La composition baigne dans une lumière claire, vive et étale. On remarque l’ombre portée du corps de Maurice Sandoz sur la surface brune de la roche. Le ciel est d’un blanc laiteux. La gamme chromatique est sobre. Construite à partir de différentes nuances de beige (ivoire, ocre, marron) de gris-vert et de bleu (les reflets de l’eau, allant du bleu clair au bleu azur), elle est rehaussée par le rouge garance du pull. 

On connaît un autre portrait de Maurice Sandoz réalisé par Louis Rivier la même année : dans un format vertical, il peint en représentation, il se tient débout, dans une tenue élégante, adoptant une posture gracieuse. Il semble être prêt pour une soirée mondaine et de spectacle.

Pour ce second portrait, Louis Rivier choisit un format horizontal, souligné par la ligne d’horizon, mouvementé par des diagonales croisées (le coude et le bras, les jambes et les genoux, les reliefs montagneux). Il déchausse son modèle, l’habille d’une tenue plus simple bien que soignée et le situe dans un contexte naturel. La mise en représentation du personnage, recherchée dans le premier tableau, laisse ici la place à une volonté de caractérisation psychologique. 

Maurice Sandoz (1892-1958) est le fils d’Edouard Sandoz, fondateur de l’entreprise chimique bâloise et frère du sculpteur Edouard-Marcel Sandoz. Il se consacra à la littérature et publia quelque quinze romans, pièces de théâtre, poèmes et récits de voyage, la plupart de ces écrits étant influencés par le surréalisme (il connaissait bien Salvador Dalì). Il composa aussi une trentaine de pièces musicales influencées par Schumann et Debussy. Sa Suite chorégraphique symphonique a été exécutée en 1913 sous la direction d’Ernest Ansermet. Il constitua aussi une collection de montres, pendules et automates des XVIII et XIXe siècles. Il habitait à Rome à l’époque de ce portrait.