Descripteurs généraux
Mots-clés formels
Mots-clés iconographie
Titre:
Crucifixion
Auteur:
Louis Rivier
Date de création:
1942-1943
Description iconographique:

Cette peinture murale représente la Crucifixion, avec le Christ sur la croix et Marie à ses pieds. Elle se trouve au fond du chœur du temple de Bottens (VD) et recouvre une portion de mur en forme d’arc sous-jacent à une voûte d’ogive. Louis Rivier a épousé l’architecture du lieu en intégrant dans sa composition la porte percée dans le chœur, notamment par le mouvement de l’arbre qui se déploie au-dessus de son arc supérieur.

Au centre de la composition, Louis Rivier peint le Christ en croix. Marie est debout aux pieds du crucifix, la tête et l’épaule droite appuyées contre la croix. Le corps de Jésus est mince, visiblement mis à l'épreuve par la Passion qui a conduit à sa mort. Ses longs cheveux châtains tombent sur son front, sa tête est ceinte d’une couronne d’épines et penche en avant. De longs clous percent et fixent les mains et les pieds à la croix. Mais il n’y a aucune plaie sur le côté, ce détail caractérise la plupart des crucifixions peintes par Louis Rivier. De petits filets de sang s’écoulent des plaies des mains et des pieds. Le traditionnel périzonium, au drapé élaboré, est noué autour des hanches.

La figure christique est pâle car exsangue. Louis Rivier prête une attention particulière au corps nu du Christ en précisant les contours des muscles étirés. La Vierge est habillée d’une longue jupe noire, elle porte un corsage en fourrure marron. Ses bras, sa tête et ses épaules sont recouverts d’une sorte de guimpe laissant apparaître seulement son visage, ovale, et ses mains, jointes sur le devant en un geste de prière. Le drapé est très élaboré, presque sculptural dans sa façon de tomber et de dessiner les plis.

Marie a une expression à la fois triste et résignée, son regard semble se perdre dans un vide intérieur. Ses yeux sont tournés en direction des pieds du Christ. Cette Vierge de douleur reprend un motif cher à Louis Rivier et déjà exprimé dans la Crucifixion réalisée dans le temple des Terreaux à Lausanne en 1928.

La croix avec son bois de nœuds et de fibres représenté de manière très réaliste se donne comme un trompe l’œil. Au sommet de la croix se trouve une inscription complétant l’effet illusionniste : un papier collé sur un cadre en bois, fixé à une fine planche, sur lequel on lit : Jésus rex iudaeorum (Jésus rois des Juifs), suivie de deux lignes en grec et en hébreu reprenant le texte latin.

Les figures du Christ et de Marie se trouvent au premier plan, à fleur du mur comme si la scène se déroulait dans l’espace du temple. La croix et les pieds de la Vierge reposent sur un pavé blanc, peint en perspective et qui prolonge l’espace réel dans la représentation. Au second plan, s’étend un ample paysage de roches brunes, de terrains arides et dévitalisés ainsi que de prés couleur vert clair traversés par des rivières, des chemins, avec un lac dans le lointain. Sur la gauche se dresse un arbre dépouillé. Ses rares branches pointent vers la croix. Une d’entre elles est cassée et pointe vers le sol. Ce détail possède une signification symbolique liée à la Crucifixion : une vie brisée et interrompue, mais aussi la fin de la tempête survenue lors de la mise à mort et le début d’une nouvelle ère. D’autres morceaux de branche gisent sur le pavement qui supporte la croix.

Le paysage est surmonté par un ciel de nuages aux nuances roses. Les rares espaces entre les cumulus sont bleu gris. Tout en haut, où apparait le sommet de la croix avec l’inscription, le ciel s’ouvre largement. Dans cet élément symbolique, surréel et majestueux, Louis Rivier trace la réponse du ciel à l’événement : le royaume des cieux offre un infini.

La composition est frontale et symétrique, l’espace aéré, une ambiance à la fois minimaliste et presque vide accentue la sensation de tristesse qui en émane. La réduction des couleurs à une variété de blancs, de gris, de rose et de marron souligne la désolation. La lumière est claire et étale, les rares ombres façonnent les plis des vêtements. Louis Rivier accentue le pathétique de la mort du Christ qui ici n'est accompagné que de sa mère éperdue de douleur contenue.

Cette peinture aux accents tragiques ouvre toute une suite d’œuvres aux mêmes tonalités. Une corrélation s’établit entre le peintre vieillissant et la mort du Christ.

La figure de Marie servira de modèle à de nombreuses autres représentations de la Vierge de douleur, notamment des tableaux vendus en Suisse orientale par le marchand Jacques Thum.